Comment venir en aide aux personnes ayant un trouble bipolaire ?

L’Organisation Mondiale de la Santé préconise une double prise en charge1 :

  • Une prise en charge médicale :

En effet, de nombreux symptômes des troubles bipolaires peuvent être soulagés (au moins en parti) par des médicaments prescrits par un médecin psychiatre. Notamment les thymorégulateurs comme les sels de lithium.

A l’heure actuelle (2022) les chercheurs n’ont précisément pas élucidé les raisons de l’efficacité du lithium sur le plan neurologique. Mais son efficacité à réduire l’apparition d’épisode hypomaniaque/ maniaque ainsi que d’épisode dépressif a été mainte fois vérifiée2. Le traitement thymorégulateurs peut-être complémenté par un traitement antidépresseur (même si en pratique c’est rarement le cas), antiépileptique, ou antipsychotique (dans les phases maniaques aiguës).

Ainsi, il est important de soutenir et de rester vigilant à ce que les travailleurs ayant des troubles bipolaires soient assidus dans la prise de leur traitement pharmacologique.

  • Une prise en charge psychosociale :

En effet, les personnes ayant un trouble bipolaire ont grandement besoin d’encrage au quotidien. Que cet encrage soit relationnel, communautaire (au sens faire partie d’un environnement social, d’une communauté) et bien entendu professionnel.

A l’ESAT c’est cet encrage professionnel que nous visons. Une attache qui peut être un socle pour la personne ayant des TBP pour retrouver une stabilité et développer de nouvelles compétences au sein d’un milieu protégé. Ce qui permettra par la suite de retrouver une confiance en soi dans les autres domaines de leur vie.

Fausses croyances sur les troubles bipolaires

En effet, si la présence d’éléments psychotique est présente chez une petite majorité de personne ayant un TBP( 53%)3. Il est important de ne pas le généraliser à l’ensemble des personnes ayant ce trouble car 47% n’en présente aucun.Les troubles bipolaires n’impliquent pas toujours une psychose (=détachement de la réalité)

Officiellement l’appellation psychose maniaco-dépressive ne s’utilise plus !

S’il nous arrive parfois de le lire ou l’entendre. Il faut savoir que le terme psychose maniaco- dépressif été celui utilisé pour décrire la maladie de 1913 à 1980. Mais qu’il a été remplacé car il était devenu trop stigmatisant envers les personnes souffrant de ses troubles.

Les personnes ayant un trouble bipolaire peuvent avoir une humeur tout à fait ‘normal’ et stable dans le temps (y compris pendant des années).

Contrairement aux idées reçues, une personne bipolaire peut stabiliser ses émotions (à l’aide d’un traitement, d’une psychothérapie, d’un environnement soutenant…) et ne plus déclencher d’épisode hypomaniaque/maniaque ou dépressif. Ou du moins réduire leurs fréquences d’apparition. Durant ses périodes de stabilité l’humeur de la personne est ‘normale’ et elle peut vivre sa vie avec plus de sérénité.

Les états dépressifs ne sont pas à comprendre comme un manque de motivation ou une mauvaise volonté de la part de la personne.

La dépression est une maladie du psychisme au même titre que les autres ! Il ne s’agit pas d’un manque de volonté ou d’une forme de fainéantise mais d’une vraie difficulté émotionnelle, cognitive et existentielle. Ainsi, culpabiliser ou contraindre une personne en dépression est contreproductif et anti thérapeutique.

Les épisodes hypomaniaque/maniaque ne sont pas des expériences ‘heureuses’ pour les personnes qui les vivent.

Si l’humeur des personnes semble extatique lors de ses épisodes et que leur créativité/productivité est décuplée. Il est important de rappeler qu’elles n’en demeurent pas moins des expériences difficiles à vivre au sein desquelles ses personnes perdent la maîtrise de leurs émotions et leurs actions. Une incapacité qui peut s’avérer désastreuse pour leur avenir.

 

Posture à adopter face à une personne atteinte de troubles bipolaire


Lors d’épisodes dépressifs :

  • Un ralentissement cognitif et moteur peut être présent. Si c’est le cas il est important de ne pas forcer la personne à accélérer son rythme de travail car sa lenteur d’exécution n’est pas un choix mais une conséquence de la dépression.
  • N’hésitez pas à prendre le temps (quand c’est possible) de parler à la personne et d’être à l’écoute de celle-ci. L’important n’étant pas de trouver des solutions mais d’accueillir de façons bienveillantes les difficultés du Souvent ce temps permet à la personne de se sentir ‘mieux’ et moins isoler.
  • Si le travailleur est dans un état dépressif trop important pour travailler n’hésitez pas à faire appel aux psychologues de l’institution.
  • Essayer dans la mesure du possible de donner des objectifs/tâches simples et rapidement réalisables par le travailleur. Sa réussite doit être ensuite reconnue et soutenue (sans être pour autant surjoué). Les tâches simples et rapides donnant un objectif à court terme sont plus tenables que les objectifs à longs termes pour une personne en dépression.
  • Si ces tâches simples n’ont pas pu être pleinement réalisées ne le reprocher pas au Au contraire, il est important d’expliquer que ce n’est pas un échec et qu’il pourra ressayer.
  • Ne minimiser pas la souffrance de l’usager (y compris avec la pensée positive). Cela ne ferait que lui faire perdre confiance en vous. Si vous souhaitez l’encourager, utiliser des formules comme : ‘ j’espère que cela ira ’, ‘je reste là pour toi si besoin’…
  • Dans les épisodes dépressifs, il peut y avoir des comportements agressif, passif-agressif ou des exigences démesurées envers les S’il reste important de remettre le cadre institutionnel et rappeler les limites, il faut toutefois faire la part des choses et comprendre ce comportement comme un appel à l’aide.
  • Dans les phases dépressives intenses, il peut y avoir des pensées suicidaires. Ses pensées sont toujours un indicateur de souffrance. Ainsi, il est essentiel de mettre en place un suivi psychologique et psychiatrique le plus rapidement possible. Mais elles ne doivent pas susciter une peur panique chez l’encadrant. En effet, une pensée suicidaire n’implique pas toujours un passage à l’acte suicidaire. Par contre si la personne a déjà un plan concret et établi et qu’elle a déjà pris ses dispositions il s’agit là d’une situation d’urgence ou une hospitalisation peut s’avérer nécessaire (dans ces moments n’hésiter pas appeler les numéros d’urgence SAMU ou pompier.) Toutefois, précisons que ces situations sont très rares en ESAT.
  • La dépression est un trouble complexe qui nécessite un travail thérapeutique (et parfois une prise en charge médicale associée). Ce travail est long et sinueux et nécessite beaucoup de patience et d’adaptation de la part de l’encadrant. Ainsi, prenez votre temps en

Lors d’épisodes hypomaniaque/maniaque :

  • Lorsque la personne est dans un épisode hypomaniaque/maniaque, elle peut manifester une grande agressivité lorsqu’elle est contrariée ou frustrée. Dans ses moments, il faut absolument éviter le rapport froid et hiérarchique ou les obligations, injonctions. Il est essentiel d’adopter une attitude souple et être dans le dialogue. Renvoyer dès que possible vers les psychologues de l’établissement.
  • Si la personne manifeste des idées délirantes ou des idées incongrues (ex : vouloir acheter trois voitures d’un ). Rester neutre et sans apriori (ne donnez pas votre avis, ne prenez pas parti.)
  • Si vous percevez une agitation intense, proposer un moment de calme à l’usager, un moment de discussion et d’introspection (self réflexion) ce moment peut potentiellement l’aider à ralentir la survenue de l’épisode ou le
  • Proposer à l’usager d’appeler son médecin psychiatre pour avancer le rendez-vous ou en prendre un en urgence. Si possible rediriger vers le psychologue.
  • Une fois l’épisode hypomaniaque/maniaque terminé, essayer d’identifier le ou les déclencheur(s) de la crise.
  • Si l’agitation devient intense proposer à l’usager de faire une tâches collective (en effet, le collectif peut parfois être contenant pour les usagers).
  • Même si l’humeur a l’air élevé la personne est en Ainsi, il est important de fournir un soutien émotionnel et bienveillant y compris dans ce moment de crise.

1 https://www.troubles-bipolaires.com/maladie-bipolaire/nature-des-troubles-bipolaires/

2 https://www.igsli.org/scientific-projects/efficacy-of-lithium-treatment.html

3 https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC5807194/

Retrouvez l’étude complète en PDF ici : Explications psychopathologique Troubles Bipolaires (1)